Si dans votre organisation, le problème est que les managers le sont devenus parce qu’ils étaient de bons techniciens, et qu’ils ne peuvent donc pas être de bons animateurs donneurs de sens, alors lisez ces lignes. Il y a des chances qu’en toute sincérité, vous fassiez toujours plus de la même chose qui échoue à cette transformation managériale que vous avez pourtant identifiée comme essentielle pour l’organisation.
Mettez-vous dans la peau d’un de ces managers, qui a été promu grâce à ses compétences, reconnues et appréciées au point que vous lui avez confié la responsabilité d’une activité et d’une équipe dont l’entreprise a besoin pour tourner.
Lui ayant accordé votre confiance, vous ajoutez que sa présence à ce poste constitue un problème, car il n’est pas capable, du fait de cette dominante technique, de contribuer à la transformation managériale qui est capitale pour l’entreprise.
Aussitôt dit, aussitôt défait ! Ce manager se désengagera rapidement de tout ce dont on le décrète incapable, par opposition à ce dont il est capable – sa technicité-. Les efforts que vous accomplirez : séminaires d’embarquement, formations, kits de démultiplication viendront seulement alimenter une musique intérieure délétère : t’es bon, mais t’es pas bon. Alors vous brandirez sous le nez de ces managers les résultats d’enquête d’engagement insatisfaisants, leur enjoindrez de changer, et vous amplifierez le son de cet air de défaite annoncée.
A contrepied, nous posons l’hypothèse suivante : puisque la forte technicité des managers est la raison majeure pour laquelle ils occupent leur poste de responsabilité, il est donc raisonnable de décider avec eux que cette capacité fait partie des solutions de l’organisation.
Dès lors, nous pouvons partir de la réalité du manager, c’est à dire partir du travail de son équipe et des gestes et savoir faire techniques, et nous pouvons décider que cela peut constituer un terreau favorable à l’émergence d’un sens nouveau, celui d’une transformation par et avec les collaborateurs créateurs de la valeur de l’entreprise.
Très concrètement,voici quelques pistes que nous expérimentons, dont le but est de susciter suffisamment d’envie et de confiance de la part des managers pour battre en brèche une autre idée reçue, qui elle aussi éteint dans l’oeuf toute chance de réussite de vos transformations : « de toutes façons, ils n’ont pas pas le temps pour ça » .
Donnez leur l’envie, ils trouveront le temps :
- Vous cessez de diffuser, d’expliquer ou de former. Vous utilisez ce temps libéré pour ouvrir des espaces permettant aux managers de parler du travail, de formuler les questions de leurs collaborateurs, leurs propres questions, leurs attentes, leurs irritants.
- Vous ne leur fournissez plus d’éléments de langage. Vous construisez avec eux les éléments de questions et les réponses adaptées, en choisissant le vocabulaire et des exemples congruants et ajustés à la réalité de celles et ceux à qui sont destinées ces informations.
- Vous leur proposez d’expérimenter des méthodes simples, à leur portée, pour animer les réunions ou travailler entre pairs un peu différemment de leurs habitudes, avec une règle absolue, celle du droit à l’essai (plutôt que le droit à l’erreur : testez ce changement de formulation et observez les réactions 😉
- Vous les consultez et vous les associez sur les principaux sujets à fort enjeu pour l’entreprise, comme on le ferait avec des partenaires en qui l’on a confiance, avant de lancer un nouveau process, une nouvelle organisation, surtout s’ils seront impliqués dans les mises en oeuvre.
- Enfin, posez-vous une question : quelle est la nature du risque que vous prenez vraiment à essayer de faire autrement, plutôt que de continuer à faire toujours plus de ce qui semble ne pas marcher ?
Ces quelques actions ne sont certainement pas universellement efficaces et ne constituent pas un nouveau catalogue de solutions 100 % gagnantes. Nous les mettons parfois en oeuvre et observons ce qu’elles produisent et cela permet de recharger d’un nouveau sens ce sujet des transformations managériales. Nous en testons d’autres, toutes nourries de cette rotation mentale qui autorise à imaginer de nouvelles façons de faire : le problème, c’est la solution.
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